Lors du Fespaco, il est plaisant de se retrouver autour d’un pot, dans les maquis de la ville, pour parler cinéma. Un soir, alors que nous partageons tranquillement sur les films, nous avons entendu à une table voisine, une personne qui tenait les propos suivants : « moi, je n’irai jamais regarder un film africain. Vous appelez ça du cinéma ? Des gens qui passe leur temps à charger des ânes, et à s’asseoir sous un arbre en donnant l’impression qu’il n’y a jamais rien à faire en Afrique. Et puis, où est l’action dans tous ça ? Le cinéma africain, c’est pas fait pour moi. »
A entendre ces propos, j’ai eu la petite idée de faire un micro trottoir pour savoir ce que l’Africain pense de son cinéma.
A la sortie de la salle du ciné burkina.
Albert, lycéen à Ouaga : « moi, j’aime bien regarder les films africains. Non seulement, ces films me permettent de me distraire, mais ils me permettent de me rendre aussi compte que l’Afrique n’a pas encore perdu ses valeurs. Je peux citer le courage, l’honneteté, et la bravoure. »
Binta, secrétaire dans une imprimerie. « Ce que je pense du cinéma africain ? En tout cas, des films comme Madame Brouette, Kabala m’ont beaucoup marqué. »
Kaboré, informaticien. « Il faut que nos réalisateurs nous proposent des films qui non seulement nous font rire, parce que je vais au cinéma pour me distraire et rire, mais aussi des films épiques. Des films qui nous montre comment on vivait avant. Il faut cela pour que nous ne perdions pas complètement notre culture dans ce monde qui se mondialise. »
A la rue marchande, maison du peuple.
Aissa Garba. « Moi, je viens d’une ville de la sous région, précisément le Niger. La bas, on ne voit jamais des films africains, si ce n’est pas à la télé. Après ce que j’ai vu depuis que je suis à Ouaga, je crois que le cinéma africain est bon. On ne s’ennuie pas, mais surtout, on ne quitte pas la salle sans se sentir interpellé soit par une scène, soit par des paroles. C’est un cinéma qui nous forme à la vie. »
Sandra, comédienne namibienne. « Que voulez-vous que je dise si ce n’est que notre cinéma est bon ! Il est certes à parfaire, mais avec le peu d’argent que nous avons pour tourner les films, on fait ce qu’on peut. »
Après ce micro trottoir, je me suis senti réconforté. Notre cinéma n’est pas aussi mauvais que cela. Il n’est peut-être pas encore parfait, mais, n’est-ce pas en forgeant que l’on devient forgeron ? Hollywood ne s’est pas battit en 30 ans.
Candide Etienne
27 février 2003
Clap Noir
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