Les JCC 2010, ce furent neuf jours de festival ! Du samedi au dimanche, quand on aime… ! Une énorme machine bien huilée, une organisation sans faille, une équipe nickel. Sous la houlette de Dora Bouchacha, hôtesse et directrice exemplaire, la grande famille du cinéma s’est à nouveau réunie dans une ambiance sans pareille.
Le théatre
Cérémonie de clôture, et lecture du palmarès, point d’orgues d’une grosse semaine de projections et de débats. Arrivée des invités sur le tapis rouge, caméras et micros, calèches et limousines, hôtesses et échassiers. Beaucoup sont partis dans l’après-midi, ce qui facilite le placement. 20H30, discours, en tête, le Ministre de la Culture : on se félicite de la forte présence des jeunes, on parle d’une session exceptionnelle. A l’écran, les grands disparus, Sotigui Kouyaté et Samba Félix Ndiaye nous parlent encore.
Comme à l’école, on commence par la fin. Images, discours et chants viennent ménager le suspense. On découvre ainsi que Frédéric Mitterrand est venu à Tunis… aux journées audiovisuelles.
Pour tout suivre, il faudrait être trilingue, car, dans l’enthousiasme, la traduction française passe souvent à la trappe. Défilé de prix spéciaux et joyeuses congratulations. Enfin, on arrive au dur.
Tanit d’or du documentaire : le président Nabil Ayouch, producteur, réalisateur et scénariste marocain remercie le public qui remplit les salles avec passion. Déplore qu’il faille faire un choix drastique et annonce le prix pour Fix Me du palestinien Raed Andoni, « pour son sens de l’auto-dérision dans un contexte difficile ». Le seul surpris à l’air d’être Raed lui-même qui monte sur la scène dans sa tenue habituelle, jeans/pull noirs et reçoit son prix très simplement sous les bravos. Prix de la présidence de la Femme Arabe (c’est nouveau) à Rouge Pâle de Ahmed Hammed , Egypte, court métrage. Quelques chants plus loin, Prix du jury des enfants : Les Palmiers blessés d’Abdellatif ben Ammar, Tunisie.
Le jury
Enfin, voici, les membres du jury compétition officielle des longs métrages, derrière leur impeccable président, Raoul Peck. La grande actrice égyptienne Elham Shanine qui focalise les objectifs, la documentariste française Diane Baratier, l’écrivain et réalisateur afghan Atiq Ramihi, le compositeur tunisien Anouar Brahem et le réalisateur sénégalais Joseph Gaye Ramaka. Après avoir cité Mahmoud Darwich, « le monde a besoin de poésie.. », le président avertit : « Nous avons récompensé ce qui nous a semblé le plus cohérent, le plus innovant, le plus inspirant » et rajoute après avoir remercié Dora et son équipe : « le cinéma ne va pas bien, il faut le dire, il reste beaucoup à faire… »
Dans la catégorie courts métrages : Bronze à l’éthiopien Zelalem Woldmariam pour Lezare. , Argent à la kéniane Wanuri Kahiu pour Pumzi, et la réalisatrice bondit sur la scène, applaudissements nourris, Or à Malik Amara pour Linge Sale, youyouyouyous yous …. Une réjouissante comédie. Un homme tranquille écrasé par une horrible matrone et qui rêve de s’en débarrasser…sans surprise…dans la salle de presse, ce film passait en boucle sur les écrans vidéo…
Prix du public : qui, les observateurs le savaient bien, ne pouvait échapper au très charmant et populaire Voyage à Alger de l’algérien Abdelkrim Bahloul. Sans surprise donc. Il monte sous les vivats, remercie Dora et émet un vœu : que les trois pays du Maghreb n’en fassent plus qu’un…
Meilleur rôle masculin à l’acteur Asser Yaseen pour son rôle dans Messages de la Mer de Daoud Abdel Sayed. En l’absence de l’intéressé, c’est l’égyptienne du jury la « reine » Elham Chahine qui se charge de la statuette. Tiens ! Nous étions beaucoup à penser au superbe acteur Abdelhadi Tourache de la Mosquée…
Meilleur rôle féminin à la sud- africaine Denise Newman pour sa grande prestation dans Shirley Adams d’Oliver Hermanus. Que justice ! Elle est très émue. Ovation ! Tout le monde est d’accord !
Denise Newman
Autre déclaration du président avant de passer aux Tanits : « Je sais comme un film est difficile à réaliser et que les efforts et les intentions ne donnent pas toujours le résultat escompté. On peut rater des films…Toutefois, chaque film recèle quelque chose de particulier… » Et il rajoute ces paroles qui passent presque inaperçues mais qui reviendront plus tard dans la mémoire des attentifs… « Ne vous y fiez pas, ces jurés ont l’air bien tranquille sur leur chaise mais ce sont des tigres et des tigresses » A bon entendeur ?
Mention spéciale, (qui n’est pas obligatoire mais qui sert à débloquer les situations en cas de débats passionnés …) Chaque jour est une fête de la palestinienne Dima El-Horr. Bon, pourquoi pas ?
Enfin les Tanits…Bronze à La Mosquée du marocain Daoud Aoulad-Syad (absent), c’est l’acteur qui monte chercher la statue. Ce film là, on l’aurait vu plus haut non ? Argent à Voyage à Alger ,encore ? Mais pourquoi pas ? Un film bien fait et qui drainera beaucoup de monde dans les salles, ça compte. Et maintenant, tout le monde attend Shirley Adams, le plus beau film de la compétition sans conteste, on a tous joué notre chemise…Mais à l’annonce des motivations du président, « innovation, jeunesse, défense des artistes etc… » on sent bien qu’on va se sentir floués…le Tanit d’Or revient à… Microphone de l’égyptien Ahmad Abdalla. Un énorme cri de joie, des embrassades sans fin, et l’équipe du film envahit la scène, le réalisateur disparaissant devant son grand acteur Khaled Abol, encore un qui fait craquer toutes les filles…Rien pour Shirley Adams ? Tout le monde se regarde avec de grands yeux.
L’équipe de Microphone
Le Ministre de la Culture et l’équipe de Microphone
Et voilà ! Force est de constater que le Maghreb et les pays arabes raflent une grande partie des prix, où est l’Afrique dans tout ça ? La salle se vide très doucement, les lauréats disparaissent sous leurs copains, et finalement, ça fait du monde content….Denise Newman va téléphoner à son jeune réalisateur Olivier Hermanus. Prix d’interprétation et Fipresci, pas rien quand même ! Raed Andoni, de Fix Me est content ? « Oui, je suis content ! » Il peut. Il avait de sérieux concurrents, dans cette compétition de qualité. Pourquoi les documentaires ne peuvent-ils prétendre qu’à un seul prix, alors qu’il y en a pléthore pour les courts ? Une injustice qu’il faudrait penser à réparer ? Le générique de Microphone envahit l’écran devant une salle vide, pas plus d’une dizaine de curieux.
Tous les autres ont trop à faire dehors, à répondre aux micros et à commenter le palmarès. Qui ne laisse personne indifférent, c’est le moins qu’on puisse en dire. Repli vers les halls de la BIAT où bars et buffets de choc fourniront les munitions pour une nuit de discussions enflammées. Du suspense, des beaux acteurs motivés, de l’émotion, du bruit, de la fureur, des grands sentiments, c’étaient les JCC2010.
M.S.
Clap Noir
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