Qui eut cru qu’au pays du chocolat et du gruyère, un festival international de courts-métrages programmerait 40 films africains ? De la compétition internationale au programme "Africa is..." en passant par le projet documentaire 5x5x5 regroupant 5 réalisateurs de 5 continents, la 15e édition du festival suisse de Winterthur a donné bien plus qu’un coup de projecteur sur l’Afrique.
Dans les rues de Winterthur, ville de 100 000 habitants située dans le canton (allemand) de Zurich, un seul sigle attire l’œil. Un mystérieux K. majuscule suivi d’un point que l’on retrouve sur les trottoirs ou des affiches vert pomme. Il s’agit du logo du Kurzfilmtage de Winterthur, la plus importante manifestation helvète de courts-métrages.
© Crédit : Kurzfilmtage
66 projections, 15 500 spectateurs en 5 jours
Au Casino, les spectateurs se pressent. Avec 66 projections étalées sur 5 jours, l’édition 2011 du festival a réuni non moins de 15 500 spectateurs. A l’affiche, des compétitions suisse et internationale, un programme "Africa is...", mais aussi des programmes de films documentaires sur Winterthur, le Rwanda, les cérémonies populaires, la propagande nucléaire et l’aide humanitaire.
Parallèlement, les écoles de cinéma suisses côtoyaient un programme Jeune Public ainsi qu’une journée des producteurs, des nocturnes Heavy Metal et Science-Fiction. Qu’on se le dise : la semaine était chargée mais l’ambition de l’équipe et les moyens nécessaires pour y arriver étaient de taille.
Africa is...
Partenaire des festivals Rencontres du Film Court (Madagascar) et Afrikaméra (Allemagne), Kurzfilmtage décide en 2009 de créer un programme spécial autour des courts-métrages africains. L’idée, ingénieuse, suscite quelques réticences. « Trouverons-nous assez de films ? » s’interrogeait John Canciani, programmateur avec Stefan Kummer et Alex Moussa Sawadogo des 6 programmes qui constituent "Africa is...".
Pour le directeur du festival Afrikaméra de Berlin, la réponse était simple. « Il existe beaucoup de films en Afrique qui ne bénéficient d’aucune visibilité. Il faut se mettre en relation avec les gens du terrain pour connaître l’actualité cinématographique et trouver des productions intéressantes ».
De fait, 38 courts-métrages datant de 2004 à 2011 et oscillant entre 1 et 26 minutes ont été sélectionnés et répartis en 6 catégories. Quatre d’entre elles concernaient le continent africain dans sa globalité : Héritage, Changement Social, Migration, Imagination. Les deux autres donnaient un coup de projecteur sur deux pays africains : l’histoire non tronquée de l’Afrique du Sud et la créativité méconnue de Madagascar.
A cela s’ajoutait Which direction to go ? [2011, 11min30], réflexion documentaire de l’éthiopien Dirbdil Assefa Akriso sur le rapport à la mort et à la crémation en Europe. Réalisé dans le cadre du projet documentaire 5x5x5 qui invitait 5 réalisateurs de 5 continents à porter 5 regards différents sur la ville de Winterthur, ce projet mené durant 5 semaines a donné l’opportunité à un élève de la Blue Nile & TV Academy d’Addis-Abeba de représenter l’Afrique.
© Crédit : Thomas Lesourd
Invités de choix
Hormis la présence, parmi les membres du jury, de la réalisatrice franco-sénégalaise Dyana Gaye, la compétition internationale présentait 3 courts-métrages africains : l’épatant Mwansa the Great de la zambienne Rungano Nyoni (mention spéciale du Jury) qui dépeint avec brio le monde imaginaire de l’enfance ; le film expérimental sud-africain 09:21:25 de Jyoti Mistry qui s’interroge sur l’espace et les éléments ainsi que le remarquable film franco-algérien Brûleurs de Farid Bentoumi, Grand Prix du festival, sur la migration inéluctable de jeunes algériens vers l’Europe.
Allant jusqu’au bout de sa valorisation des cinémas d’Afrique, le festival de Winterthur n’a pas oublié d’y associer ses principaux acteurs. [1] Leur présence fut l’occasion d’une belle table ronde sur la production et la diffusion de courts-métrages africains où festivals (RFC, Afrikaméra), école de cinéma (Blue Nile Film & TV Academy) et réalisateur (Dieudo Hamadi) ont partagé leurs expériences et réflexions.
Autre invitée de ce panel, Martina Malacrida, directrice du laboratoire de coproduction Open Doors du festival de Locarno, a clôturé cette 15e édition en présentant un appel à projets 2011 destiné aux réalisateurs et producteurs d’Afrique francophone subsaharienne. En l’espace de 5 jours, le festival de Winterthur a auréolé la créativité africaine de toutes les étoiles qu’elle mérite.
Claire Diao
Festival International Kurzfilmtage de Winterthur, Suisse,
du 9 au 13 novembre 2011
www.kurzfilmtage.ch
Notes :
1 L’Éthiopie était représentée par Abraham Haile Biru et Dirbdil Assefa Akriso Which direction to go ? , l’Afrique du Sud/Zambie par Rungano Nyoni Mwansa the Great , l’Algérie par l’acteur franco-marocain Samir Harrag Brûleurs , la République Démocratique du Congo par Dieudo Hamadi Tolérance Zéro , le Cameroun par Auguste Bernard Kouemo Yanghu Waramutseho ! et Madagascar par 4 réalisateurs : Laza Fragments de vie , José Rakotobe Dès la racine , Manohiray Randriamanjo Afropower et Ludovic Randriamanantsoa Le Glas .
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