Accueil > Actualités festivals > Archives festivals > JCC - Carthage 2008 > Les chroniques tunisiennes - 27 octobre
Les chroniques tunisiennes - 27 octobre
Publié le : lundi 27 octobre 2008
22eme édition du 25 octobre au 1er novembre 2008

11h00 - Compétition offi­cielle au Mondial. Zimbabwe de Darrell Roodt, Afrique du Sud. Tout le jury au pre­mier rang, qui visionne 4 films par jour. Le sida a fait fondre le réseau fami­lial, la misère s’ajou­tant à l’aban­don des valeurs tra­di­tion­nel­les d’entraide. Une jeune fille décide de fran­chir la fron­tière pour gagner l’Eldorado sud afri­cain. Réseaux clan­des­tins, escla­va­gisme ordi­naire de la petite bonne noire abusée par ses patrons afri­ka­ners et retour à la case départ, avec, tou­te­fois une lueur d’espoir. Classique avec une image sur tra­vaillée jusqu’à l’hyper­réa­lisme pour la partie de son errance au Zimbabwe.




15h00 - sélec­tion Cinémas du monde. Dans un Colysée juste sorti des tra­vaux, Terra Somnambula de Teresa Prata, Mozambique. Une VO en por­tu­gais encore sous titrée en anglais ! Très beau conte. Ou com­ment, dans un pays dévasté par la guerre civile, un enfant sauvé de la mort par un vieil homme va à la recher­che de sa mère, et la retrou­vera après une longue marche en boucle et le carnet trouvé sur le corps d’un inconnu encore chaud. Ou com­ment malgré la mort et la guerre, on peut encore espé­rer, rêver et aimer. Superbes images.

Sotigui entouré du jury des enfants

18h00 - Au Mondial ; com­pé­ti­tion offi­cielle. Faro, reine des eaux du malien Salif Traoré. Toute l’équipe est là y com­pris le grand Sotigui Kouyaté, déjà 3 fois honoré par les JCC, des tuyaux dans le nez et sur une chaise rou­lante, qui a tenu à faire le voyage et qui remer­cie de l’atten­tion qu’on lui porte. Il est entouré du jury des enfants. Dans un vil­lage du Mali, au bord du fleuve Niger, un bâtard ins­truit revient décou­vrir le nom de son père, et ce fai­sant, bou­le­verse l’équilibre de la com­mu­nauté. « J’ai voulu, déclare, Salif Traoré, mettre l’accent sur la situa­tion des enfants aban­don­nés qui peu­plent les rues de nos capi­ta­les afri­cai­nes, sur la pau­vreté des popu­la­tions rive­rai­nes du Niger qui ne savent pas, par crainte, en tirer les res­sour­ces qui sont à leur portée, et sur la situa­tion des femmes qui, au moment des gran­des déci­sions, sont exclues de la dis­cus­sion. » Ce film, il a mis 20 ans à le faire, 10 ans de pré­pa­ra­tion, 10 pour trou­ver les finan­ce­ments. « Il y avait 5 ans que le Mali n’avait pas pro­duit de film. Celui-ci sort le 29 octo­bre à Paris, sans que je sois invité ! » Et de reve­nir sur la situa­tion dra­ma­ti­que de la pro­duc­tion ciné­ma­to­gra­phi­que en Afrique de l’ouest. « En 83, Sembene avait un projet de film, il a mis 20 ans pour ne pas arri­ver à le faire ! »

Retour à l’Africa ! Bonne nou­velle, j’ai enfin mon badge, je peux rendre celui qu’on m’avait prêté, je m’ins­talle pour manger à la table d’un jeune homme. Discussion. Oui, il est là pour le fes­ti­val, non, il n’a pas encore vu de film, en fait il pré­fère les films amé­ri­cains, « ques­tion de géné­ra­tion, dit-il », oui, il a été invité et pour­quoi alors ? Il accom­pa­gne son père, pré­si­dent du jury. C’est le fils de Yasmina Khadra « mais je ne vous en dirai pas plus, d’ailleurs mon père ne nous raconte rien ! ». Il pleut !

Cinéma Mondial © blcef

21h00 - Retour au Mondial pour Mascarades pre­mier long métrage de l’algé­rien Lyes Salem en com­pé­ti­tion offi­cielle. Il faut savoir anti­ci­per, la salle est bondée, encore une fois des gens assis dans les allées et debout contre les murs. Et comme ils ont raison ! Une comé­die abso­lu­ment réus­sie, finesse des per­son­na­ges, sans aucune rup­ture de rythme, allant cres­cendo avec une pêche fan­tas­ti­que, accom­pa­gnée d’une allè­gre musi­que. Accueil déli­rant à la sortie. La jeune équipe au com­plet pou­vait goûter les fruits d’un tra­vail cer­tai­ne­ment accom­pli dans l’enthou­siasme. Dans le bled, Mounir un fan­fa­ron macho (pléo­nasme ?), règne sur sa famille. Sa belle et jeune sœur qui s’endort à tout bout de champ est son pré­cieux far­deau, toutes les filles se marient sauf elle. Un soir trop arrosé il clame dans les rues du vil­lage la bonne nou­velle : un riche pré­ten­dant, étranger qui plus est, s’est pré­senté. Phantasme d’ivro­gne, que chacun fait sien illico, tant le quo­ti­dien est pauvre en évènement. Comment se tirera- t-il de ce mau­vais pas sans perdre la face ? C’est le sus­pense qui tien­dra le spec­ta­teur jusqu’à la fin. Le réa­li­sa­teur tient le rôle du fan­fa­ron, beau, lâche, fra­gile et tou­chant, heu­reu­se­ment aimé par une épouse intel­li­gente et tendre. Entouré de ses copains, traîne sava­tes qui le piè­gent à son propre jeu, entre scènes de bars et virées fes­ti­ves. Esclave de ses paro­les, Mounir a des rêves trop grands pour lui. Les hommes au dehors font de grands mou­li­nets, les femmes à la maison ana­ly­sent et tien­nent les rênes, pas trop cour­tes. La vie du vil­lage aujourd’hui entre pay­sage magni­fi­que et débrouille au quo­ti­dien. Une vigou­reuse gaîté qui convo­que entre autres, les comé­dies ita­lien­nes (et le Fanfaron de Monicelli, bien sûr), ainsi que celles de Kusturica. Un film débor­dant de vie comme une orange bien mûre.

Michèle Solle (Clap noir)

Également…

Clap Noir
Association Clap Noir
18, rue de Vincennes
93100 Montreuil - France
Tél /fax : 01 48 51 53 75