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Vénus noire
Abdellatif Kechiche
Publié le : dimanche 24 octobre 2010

Un film d’ Abdellatif Kechiche, France Italie Belgique, 2010, 169’

Sortie fran­çaise 27 octo­bre 2010


SYNOPSIS

Paris, 1817, enceinte de l’Académie Royale de Médecine. « Je n’ai jamais vu de tête humaine plus sem­bla­ble à celle des singes ». Face au mou­lage du corps de Saartjie Baartman, l’ana­to­miste Georges Cuvier est caté­go­ri­que. Un par­terre de dis­tin­gués col­lè­gues applau­dit la démons­tra­tion. Sept ans plus tôt, Saartjie quit­tait l’Afrique du Sud avec son maitre, Caezar, et livrait son corps en pâture au public lon­do­nien des foires aux mons­tres. Femme libre et entra­vée, elle était l’icône des bas-fonds, la « Vénus Hottentote » pro­mise au mirage d’une ascen­sion dorée...

CRITIQUE

Le nou­veau film d’Abdellatif Kechiche s’ins­pire de l’his­toire vraie de Saartjie Baartman, cette femme sud-afri­caine exhi­bée dans les socié­tés lon­do­nien­nes et pari­sien­nes au début du XIX siècle, qui finit dis­sé­quée entre les mains de scien­ti­fi­ques fran­çais.

Le film est lent, aucune ellipse, mais cette len­teur est syno­nyme de den­sité. Tourné majo­ri­tai­re­ment en inté­rieur, peu éclairé, l’his­toire est décou­pée en tableaux, de plus en plus durs.
Les scènes de spec­ta­cles sont le point fort du film. A la fois insou­te­na­bles et dénuées de com­plai­sance, elles nous com­mu­ni­quent l’hor­reur de la vio­lence jusque dans leur durée, leur répé­ti­tion. Kéchiche réus­sit à mettre le spec­ta­teur mal à l’aise ; soit l’on accepte ce matra­quage en se rac­cro­chant sur le peu de scènes atten­dris­san­tes - comme l’artiste pein­tre cro­quant la Vénus - offrant un souf­fle d’huma­nité, soit l’on refuse ce trai­te­ment, non jus­ti­fié dans sa durée car insou­te­na­ble.
A-t-on besoin d’un film de 2h40’ pour com­pren­dre l’inac­cep­ta­ble et le droit à la dif­fé­rence ? Est-ce néces­saire de pous­ser notre voyeu­risme au point cri­ti­que ?
Yamina Torres - excel­lente comé­dienne non pro­fes­sion­nelle - joue avec grande vérité le destin tra­gi­que de Saartjie. Peu à peu broyée par sa ser­vi­tude, on suit dans la souf­france sa des­cente aux enfers. Filmée de très près - sou­vent cadrée en très gros plans - on retient de la Vénus Noire un visage sim­ple­ment humain, au point d’en oublier tota­le­ment son corps et son ori­gine.
Ce film est vio­lent et sans conces­sion. Ce que Kechiche nous ensei­gne, c’est une réflexion morale sur l’incons­cience de ceux qui pla­cent leur civi­li­sa­tion très au-dessus de ceux qu’ils mépri­sent, au point de les asser­vir. Le point de départ d’une société raciste, l’établissement d’une fron­tière entre les colo­niaux et la popu­la­tion exo­ti­que, les « sau­va­ges ». C’est fina­le­ment l’âme de cette société que dénonce le réa­li­sa­teur, le droit à la dif­fé­rence.

B. Tiprez


Y. Torres et A. Kechiche

LE REALISATEUR

Né à Tunis en 1960, Abdellatif Kechiche arrive à Nice à l’âge de 6 ans. Attiré par le théâ­tre, il suit des cours de comé­die au Conservatoire d’Antibes et joue dans plu­sieurs pièces ; en 1978 dans "Sans Titre" de Garcia Lorca, en 1979 dans " Un Balcon sur les Andes " d’Edouardo Manet au théâ­tre de l’Odéon à Paris. En 1981, Il se lance également dans la mise en scène et monte " L’Architecte et l’empe­reur d’Assyrie " de Fernando Arrabal, au Festival d’Avignon.
Il débute au cinéma en 1984 en tenant le rôle prin­ci­pal du film "Le Thé à la menthe" d’Abdelkarim Bahloul et jouera par la suite dans de nom­breux films. En 2000, Il passe der­rière la caméra en signant " La Faute à Voltaire" pour lequel, cette même année, il est récom­pensé par le Lion d’Or de la meilleure pre­mière œuvre à Venise.

Filmographie

• Réalisation
2010 Vénus noire
2006 La graine et le mulet
2003 L’Esquive
2000 La faute à Voltaire
• Scénarii
2003 L’esquive
2000 La faute à Voltaire
1997 La graine et le mulet
• Acteur
2005 Sory, Hater de Jeff Stanzler
2001 La boîte magi­que de Ridha Behi
1996 Marteau rouge de E. Plumet et L. Phan Le secret de poli­chi­nelle de Franck Landron
1992 Bezness de Nouri Bouzid
1991 Un vam­pire au para­dis de Abdelkrim Bahloul
1987 Les inno­cents de André Téchiné, Mutisme de Philippe Ayache
1984 Un thé à la menthe de Abdelkrim Bahloul

FICHE TECHNIQUE

Réalisation et scé­na­rio ori­gi­nal : Abdellatif Kechiche
Avec : Yahima Torres, André Jacobs, Olivier Gourmet, Elina Lowensohn, François Martouret, Michel Gionti, Jean-Christophe Bouvet
Adaptation et dia­lo­gues : Abdellatif Kechiche et Ghalya Lacroix
Image : Lubomir Bakchev, Sofian El Fani
Montage : Camille Toubkis , Ghalya Lacroix , Laurent Rouan , Albertine Lastera
Son : Nicolas Waschkowski - Jean-Paul Hurier
Décors : Florian Sanson, Mathieu Menut
Costumes : Fabio Perrone
Casting : Anne Fremiot, Monya Galbi
Musiques ori­gi­na­les : Slaheddine Kechiche
Co-pro­duc­tion : France2 cinéma, Cinécinéma
Production : MK2

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