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Lieux Saints
Jean-Marie Teno
Publié le : mercredi 15 juillet 2009

Un film de Jean-Marie Teno, Cameroun France, 2009, 70’







SYNOPSIS

À tra­vers le por­trait de 2 hommes, Jules César l’artiste arti­san et Bouba le petit entre­pre­neur, Lieux Saints pose la ques­tion de l’accès à la culture dans un quar­tier popu­laire de Ouagadougou et montre com­ment le refus de la misère cultu­relle est devenu un des moteurs de lutte contre la misère économique.

CRITIQUE

Au détour des ruel­les de Ouagadougou, bien en marge des sites offi­ciels du Fespaco, Jean-Marie Teno nous emmène dans son fil « Lieux Saints » à la décou­verte d’une ciné­phi­lie de quar­tier, clan­des­tine et bri­co­leuse.
Le Ciné Club qui s’impro­vise dans une cour de terre battue dont les stores som­mai­res dis­si­mu­lent tant bien que mal la lumière du dehors pen­dant les séan­ces de jour est un modèle de débrouillar­dise. Organisé de manière métho­di­que, il renou­velle régu­liè­re­ment sa pro­gram­ma­tion grâce au marché noir, véri­ta­ble indus­trie cultu­relle paral­lèle en Afrique, bien avant l’avè­ne­ment de l’ère du télé­char­ge­ment de masse.
Teno nous parle donc de l’économie de la culture en Afrique, de l’iso­le­ment du public qui n’a accès qu’à une frange très maigre de la pro­duc­tion, des lacu­nes fla­gran­tes de la dis­tri­bu­tion du cinéma afri­cain y com­pris et peut-être sur­tout sur son propre conti­nent. Mais dans le fond ce n’est pas tel­le­ment ce dont il veut vrai­ment faire la démons­tra­tion. Au fil du film, des scènes nous emmè­nent à la ren­contre d’autres per­son­na­ges du quar­tier, qui n’ont en commun avec le ciné-club que leur lieu de rési­dence.
La vie s’orga­nise peu à peu autour de ce lieu emblé­ma­ti­que, et c’est l’art du récit qui est à l’hon­neur, au gré des anec­do­tes de l’écrivain public, du poète de rue, du fabri­cant de djem­bés qui tous nous font part de leur rap­port à la parole et aux his­toi­res.
C’est là que veut en venir Jean-Marie Teno, et le puzzle se recons­ti­tue fina­le­ment quand la théo­rie s’énonce clai­re­ment : loin d’être étranger à la culture afri­caine, le cinéma qui pour­tant survit avec tant de dif­fi­culté sur le conti­nent n’est autre qu’un des des­cen­dants de la tra­di­tion grio­ti­que ances­trale. Si l’argu­ment semble déjà entendu, par­fois gal­vaudé, récu­péré à tout va lorsqu’on vante la pro­duc­tion cultu­relle afri­caine, la démons­tra­tion est effi­cace, et donne un sens d’autant plus édifiant aux ques­tions de la dif­fi­culté économique à faire exis­ter le cinéma sur le conti­nent.
On regrette en revan­che qu’il ait fallu autant s’inter­ro­ger sur la logi­que de cons­truc­tion de ce film en suc­ces­sion de séquen­ces appa­rem­ment dis­join­tes pour en com­pren­dre fina­le­ment le sens, qui peine à se déga­ger avant que ne soit exposé clai­re­ment le pos­tu­lat de départ.

Certaines séquen­ces pour­tant par­vien­nent à déli­vrer un sens et une émotion pal­pa­bles dans une économie de mots totale, ainsi le coup de foudre du gérant du ciné-club pour un écran de télé­vi­sion grand format der­nier cri de toute évidence bien au-dessus de ses moyens laisse émaner à la fois la ten­dresse du réa­li­sa­teur pour cette pas­sion popu­laire et l’âpreté d’une réa­lité maté­rielle dont on se demande com­ment elle sera amenée à chan­ger.

Sophie Perrin

LE REALISATEUR

Né le 14 mai 1954 à Famleng (Cameroun). Après des études de com­mu­ni­ca­tion audio­vi­suelle à Valenciennes (France) il a tra­vaillé comme cri­ti­que ciné­ma­to­gra­phi­que pour Bwana Magazine et de 1985 à 1997 comme chef mon­teur à France 3. En 1983, il réa­lise son pre­mier film Schubbah, un court métrage docu­men­taire consa­cré à la vie des jeunes immi­grés d’ori­gine afri­caine. Jean-Marie Teno est également pro­duc­teur et dirige la société de pro­duc­tion Les Films du Raphia. Il tourne la plu­part de ses films au Cameroun.

FILMOGRAPHIE

- 1983 : Schubbah, docu­men­taire (15’), 16mm
- 1985 : Fièvre jaune - taxi­man, fic­tion (30’), 16mm
- 1985 : Hommage, docu­fic­tion (13’), 16mm
- 1986 : La Gifle et la caresse, fic­tion (20’), 35mm
- 1987 : De Ouaga à Douala, en pas­sant par Paris, docu­fic­tion (75’), 16mm
- 1988 : Bikutsi Water Blues, docu­fic­tion (93’), 35mm
- 1990 : Le Dernier Voyage, fic­tion (19’), 16mm
- 1991 : Mister Foot, docu­fic­tion (22’), 16mm
- 1992 : Afrique je te plu­me­rai, docu­men­taire (88’), 16mm
- 1994 : La Tête dans les nuages, docu­men­taire (40’), 16mm
- 1996 : Clando, fic­tion (98’), 35mm
- 1999 : Chef ! , docu­men­taire (61’), 35mm
- 2000 : Vacances au pays, docu­men­taire (80’), 35mm
- 2002 : Le Mariage d’Alex, docu­men­taire (45’), vidéo
- 2004 : Le malen­tendu colo­nial, docu­men­taire (78’), vidéo

FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Jean-Marie Teno
Scénario : Michèle Solle, Jean-Marie Teno
Images : Crystel Fournier, Jean-Marie Teno
Son : Jean-Marie Teno
Montage : Christiane Badgley, Jean-Marie Teno
Musiques : Smockey, The Alloy Orchestra
Production et dis­tri­bu­tion : Les Films du Raphia contact chez raphia.fr
http://www.raphia.fr/

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