Question de point de vue
Publié le : dimanche 16 décembre 2007
Fespaco 2007



Ciné Neerwaya




Cette année, un concert de son­ne­ries a envahi les salles de cinéma du Fespaco. Chaque pro­jec­tion est ponc­tuée d’un « Allo c’est qui ? » « Je suis en pro­jec­tion là… ».
Aujourd’hui à Ouaga, on com­mente le film non seu­le­ment avec son voisin mais aussi avec ceux que l’on a en ligne. Je décide d’aban­don­ner ma pelure d’occi­den­tale et de me mettre en empa­thie avec le public. Pas de juge­ment intem­pes­tif, je m’adap­te­rai au contexte et à la par­ti­cu­la­rité de ce fes­ti­val : la diver­sité cultu­relle (titre de cette 20e édition), mais sur­tout la dif­fé­rence de point de vue. Neerwaya, Burkina, Grand Méliès, Oubri, autant de salles inves­ties par un public hété­ro­clite, où pro­fes­sion­nels, ama­teurs, occi­den­taux et afri­cains s’unis­sent pour créer un public aux atten­tes bien dif­fé­ren­tes. Confrontée à la diver­gence des sen­si­bi­li­tés, je m’inter­roge sur l’objec­ti­vité et je reste tiraillée à émettre le moin­dre juge­ment.
Chaque film pro­vo­que des réac­tions diver­ses. Une scène tra­gi­que bou­le­ver­sera cer­tain et fera rire les autres.

Les sor­ties de salle sont sujet­tes à des débats pas­sion­nés sur le film pro­jeté.
Prenons par exem­ple « Bamako » d’Abderrahmane Sissako que j’ai vu à Paris en avant pre­mière. J’avais la cer­ti­tude que ce film ne s’adres­sait qu’à un public d’ini­tiés et d’intel­lec­tuels, qu’il n’était pas adapté à un public popu­laire. Je dois admet­tre que je me suis trom­pée. Ici « Bamako » est reçu par le public afri­cain comme le film porte parole de leur cause. Symbole de la lutte de l’Afrique pour être reconnue comme un conti­nent dont l’influence est incontes­ta­ble, « Bamako » est devenu leur film réfé­rence. Mes cer­ti­tu­des ont reçu une leçon salu­taire.

J’ai vécu une expé­rience simi­laire hier à la sortie du film malien « Faro » de Salif Traoré. Adama, bur­ki­nabé est bou­le­versé. « C’est mon his­toire ! C’est comme dans mon vil­lage ! Vraiment j’ai adoré ». Puis des fran­çais me confient qu’ils se sont ennuyés et qu’il fau­drait arrê­ter les films « cale­bas­ses » qui racontent tou­jours des his­toi­res de tra­di­tion au vil­lage. Tout est une affaire de point de vue. Moi qui pen­sais que les afri­cains en avaient assez des films auto­bio­gra­phi­ques, et qui accu­sais les fran­çais d’avoir une vision de l’Afrique post-colo­niale ! Je demeure sans voix, mais néan­moins j’en tire la conclu­sion que tout est affaire de point de vue !

Le Fespaco reste un rendez-vous indis­pen­sa­ble pour se faire une idée de l’impact d’un film sur un public aussi varié.

Isabelle Audin

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